mardi 19 juin 2012

La hiérarchie chez les maçons.



La hiérarchie chez les maçons, comme l'expliquait Louis Bandy de Nalèche (1828-1879), avocat et politicien libéral, dans son ouvrage « Les maçons de la Creuse » publié en 1859 :

L’art de la maçonnerie n’a pas fait de sensibles progrès ; nous trouvons dans le Dictionnaire des arts et métiers de Lucotte, architecte, la nomenclature des ouvriers en bâtiment, qui en 1783 était exactement la même qu’aujourd’hui.
La voici :

1. Le premier et le chef des ouvriers est l’architecte. Son emploi est de faire les plans et les élévations des bâtiments, d’en diriger tous les détails, de dresser les devis et marchés, et de régler les prix lorsque les ouvrages sont terminés. Dans les grands édifices, il est aidé ordinairement des contrôleurs, inspecteurs, sous-inspecteurs et autres architectes inférieurs.

2. Après l’architecte, le premier ouvrier est le maître maçon. Son emploi est de conduire la maçonnerie du bâtiment, suivant les plans et élévations qui lui sont donnés par l’architecte ou ses préposés, de fournir tous les matériaux, de les employer, d’en diriger l’économie, ce qu’on appelle entreprise.

3. Le deuxième ouvrier est le maître compagnon, homme de confiance et instruit dans l’art, qui agit pour les intérêts du maître maçon et en son absence. Son emploi est de donner tous les soins à la main-d’œuvre, de faire l’appel des ouvriers le matin et le soir, et son rôle pendant la journée, de donner des récépissés des matériaux à mesure qu’ils arrivent, d’emmagasiner et prendre soin des équipages et ustensiles, en un mot, de veiller à l’économie générale du bâtiment.

4. Le troisième est l’appareilleur. Son emploi est de construire les épures (dessins détaillés des voûtes), d’après les détails du maître maçon, d’appareiller les pierres et d’en fixer la dimension. Le prix de sa journée est d’environ 3 livres à Paris. Il est quelquefois aidé par ses compagnons ou garçons du tas, appareilleurs inférieurs ; le prix de la journée est moindre.

5. Le quatrième ouvrier est le tailleur de pierre. Son emploi est de tailler la pierre et de lui donner les formes qu’elle doit avoir, suivant les dimensions que lui a données l’appareilleur. Le prix de sa journée est depuis 35 jusqu’à 45 sous.

6. Le cinquième ouvrier est le poseur. Son emploi est de mettre en place les pierres, de les poser de niveau et à plomb, et d’en scier les joints lorsqu’il est nécessaire. Le prix de sa journée est d’environ 45 sous.

7. Le sixième ouvrier est le scieur de pierre dure. Son emploi est de scier les pierres dures à la scie sans dents, à raison de 4 à 5 sous le pied carré, pour les pierres ordi¬naires, et jusqu’à 10 sous pour les pierres de liais.

8. Le septième ouvrier est le scieur de pierre tendre. Son emploi est de scier les pierres tendres à la scie à dents. Prix de journée de 35 à 40 sous.

9. Le huitième ouvrier est le compagnon maçon. Son emploi est de construire les ouvrages en plâtre. Gain 40 sous par jour.

10. Le neuvième ouvrier est le limousin. Son emploi est de construire les ouvrages en mortier. Gain 36 sous par jour.

11. Le dixième et dernier ouvrier est le manœuvre. Son emploi est de faire les ouvrages bas et rudes et de servir les autres. Gain 25 et 30 sous par jour.

12. Ceux qui servent les maçons (un seul pour chacun) battent le plâtre, le passent, le gâchent et le portent aux maçons pour l’employer.

13. Ceux qui servent les poseurs, au nombre de deux ou trois pour chacun, les aident à porter, lever, rouler les pierres dans leur place.

14. Ceux qui sont employés aux chariots sont six pour les traîner et un ou deux suivent par derrière, chargés chacun d’eux d’une pince pour aller à la roue.

15. Ceux qui sont employés à barder les pierres, c’est-à-dire à les mettre en chantier et à les remuer, appelés bardeurs (onzième ouvrier), sont par bandes de trois ou quatre chacune, s’entraidant mutuellement, un d’eux conduisant la bande.

16. Ceux qui sont employés aux engins sont plus ou moins nombreux, suivant les besoins.

17. Un douzième ouvrier, employé par le maître maçon, et qui n’est appelé que lorsque le bâtiment est fini, est le toiseur. Son emploi et souvent son seul talent est de savoir toiser toutes les parties du bâtiment suivant les usages et la loi, d’en dresser les mémoires et d’y mettre des prix relatifs aux marchés et à l’espèce d’ouvrage. Le prix de son travail est ordinairement de 10 pour 1.000, mais un peu moins pour les grands édifices. »

vendredi 15 juin 2012

Daeninckx et les "démolisseurs limousins" dans Le Banquet des affamés


Oui "démolisseurs limousins"! C'est par cette expression que Didier Daeninckx désigne les maçons de la Creuse dans son dernier et fort mauvais roman, Le Banquet des affamés. Chantre de la dite "littérature prolétarienne", celui-ci ignore d'une que dans un chantier ceux qui démolissent un bâtiment et ceux qui le construisent ( la chose est encore plus vraie pendant les travaux du baron Haussmann) ne sont pas les mêmes personnes. En ce qui concerne les "limousins" de Daeninckx, a savoir les ouvriers du bâtiment de Creuse, de Haute-Vienne et de Corrèze, il suffit de se rapporter aux ouvrages sur le sujet comme aux mémoires d'anciens maçons pour bien voir qu'ils n'ont jamais participer aux nombreuses démolitions qui ont frappé Paris au XIXème siècle. Si pour l'auteur il s'agissait de parler de "démolisseurs" au sens large, sous-entendant qu'ils ont participer en masse aux travaux d'Haussmann, l'expression est alors bien mal choisie.
De toute manière, ce roman écrit à la première personne qui veut nous raconter l'histoire de Maxime Lisbonne, éminent Communard est a bien d'égard douteux historiquement, faible au niveau littéraire et bourré d’anachronismes...


samedi 9 juin 2012

Quelques noms...




Quelques noms parmi les 953 creusois arrêtés pour avoir pris part à l’insurrection communaliste. Quelques noms, parmi les milliers de creusois qui prient part de près ou de loin à la lute dans les rangs fédérés en 1871. On estime qu'entre 1500 et 3000 creusois, pour la plupart maçons, seraient morts (tués ou fusillés) pendant les combats sur les remparts et la Semaine Sanglante. 


François Aufaure, maçon né à Bussière Dunoise (Creuse) en 1852, prend part à l’insurrection de la Commune de Paris et est condamné à la déportation  en Nouvelle Calédonie jusqu’en 1879. .

Antoine Blondet, tailleur de pierre né à Jalesches (Creuse) en 1845, prend part à l’insurrection de la Commune de Paris au sein du 119ème bataillon de la garde nationale et est condamné à la déportation en Nouvelle Calédonie. 

Jean Coucaud, maçon né à Chabannes (Creuse) en 1848, prend part à l’insurrection de la Commune de Paris et est condamné à la déportation en forteresse. 

Jean Dissoubray, né à Saint Germain Beaupré (Creuse) en 1835, prend part à l’insurrection de la Commune de Paris et est condamné à 5 ans de détention.  36 ans.

Félix Gaumet, maçon né en 1832 à Champagnac (Creuse), prend part à l’insurrection de la Commune de Paris comme capitaine au 214ème bataillon de la garde nationale et est condamné par contumace à la déportation en forteresse. 

Simon Givernaud, né à Saint Vaury (Creuse) en 1839, militaire puis fleuriste à Paris. Sergent au 88ème bataillon de la garde nationale pendant le 1er siège, il est élu sous lieutenant au même bataillon et reçoit 2 blessures en défendant la barricade de la rue de Turbigo. Condamnée à la déportation en Nouvelle Calédonie en 1872, sa peine est commuée en 5 ans de détention. 

Jean Gouny, maçon né en 1833 à Aubusson  (Creuse) , simple garde au 183ème bataillon pendant le premier siège, il prend part à l’insurrection de la Commune de Paris, est arrêté le 28 mai près de la mairie du XXème arrondissement où il a pris part aux derniers combats, condamné à la déportation en 1872, sa peine est commuée en 3 ans de prison avec privation de droits civiques. 

Etienne Jardy, maçon né à La Feyté (Creuse) en 1840, prend part à l’insurrection et est condamné à la déportation en Nouvelle Calédonie jusqu’en 1879.

André Lagoutte, maçon né Saint Sébastien (Creuse) en 1843, prend part à l’insurrection de la Commune de Paris au sein du 165ème bataillon de la garde nationale. Arrêté par les allemands le 29 mai, condamné à la déportation. 

Antoine Peynot, militaire puis maçon, né en 1837 à Parsac (Creuse), prend part à l’insurrection de la Commune de Paris au sein du 110ème bataillon de la garde nationale, fait prisonnier place Jeanne d'Arc, condamné à 1 an de prison

François Sauvanet, tailleur de pierre né à Blessac (Creuse) en 1842, prend part à l’insurrection de la Commune de Paris comme lieutenant dans l’artillerie de la XIVème légion. Condamné par contumace en 1872 à la déportation en enceinte fortifiée. 

Auguste Tartary, maçon né à la Rochette (Creuse) en 1838, prend part à l’insurrection de la Commune de Paris au sein du 156ème bataillon fédéré. Il suit son bataillon sur les remparts contre les Versaillais. Pendant la semaine sanglante, Tartary se bat successivement dans le sud de la capitale, à Nation, sur la voie e chemin de fer de ceinture puis au Père-Lachaise. Errant, il est finalement arrêté. Condamné à la déportation en Nouvelle Calédonie où les autorités le qualifièrent de « communard incorrigible ». Amnistié en 1879. 


lundi 28 mai 2012

Il faut les plaindre et non les blâmer.


Aujourd’hui, il faut les plaindre et non les blâmer ils éveillent dans toutes les âmes de profondes compassions, parce qu’ils accusent la misère de les avoir poussés au mal, parce que personne, personne, entendez-vous, ne peut nier que la misère est une des causes de leur dégradation… Allez donc dire au peuple que la prostitution est un crime ; il vous répondra que le gouvernement la soutient quand elle lui paye patente…  Allez lui prêcher les vertus domestiques, le travail, l’ordre, l’économie, la chasteté, le mariage ; allez lui prêcher cela, il vous montrera de grandes dames qui roulent en équipage…

Martin Nadaud à l'assemblée nationale en 1851.



Est-il besoin de présenter Martin Nadaud, creusois du hameau de La Martinèche ( commune de Soubrebost ), jeune saisonnier qui après avoir longtemps travailler et appris à lire, écrire, fut un des premier députés OUVRIER élu dans une assemblée parlementaire française. Il se targuait d'y porter la blouse des travailleurs aux mains nues, sous les quolibets et les insultes des beaux messieurs de la droite réactionnaire.
Ce discours qu'il prononça sous les huées de la droite, portait à défendre les débits de boissons des quartiers populaires, seuls lieux de vie des ouvriers maçons de la capitale et que la droite "moralisatrice", visait à interdire autant comme endroit de "débauche" que comme lieux où l'on pouvait discuter, parler donc forcément conspirer. A Paris en 1851 comme en 2012, le citoyen censé sait ou est la débauche: dans les beaux quartiers. Et cela Martin Nadaud l'avait compris.

dimanche 27 mai 2012

L'Express: A Paris en 1871, beaucoup de communards étaient creusois.

Dans l'édition spéciale de L'EXPRESS ( numéro 3177, semaine du 23 au 29 mai 2012 ), un dossier de 12 pages intitulé: "Comment le Limousin est devenu français". Une article signé F.S. (Fuck Sarkozy? Flight Simulator ? Forces spéciales?) s’intéresse aux maçons de la Creuse. La Chose n'est pas ennuyeuse puisqu'elle reprend divers propos attribué à Michel Kiener, ancien adjoint à l’urbanisme de Limoges qui proclame comme il se doit que "les migrants creusois ont bâti Paris!" 



Il explique en quelques mots que la terre Marchoise, "pays de petites propriétés" où "l’agriculture n'arrive pas à nourrir toute la population" se voit forcer de se séparer de ses fils qui dès le XIIe siècle quittent leurs chaumières pour devenir travailleurs saisonniers sur les chantiers de France et d'ailleurs. 
S'il utilise le mot "légende" quant à l'attribution de la cathédrale Notre Dame de Paris par les maçons creusois, il confirme bel et bien que ce sont les mêmes hommes qui partis de la Souterraine en 1287, sont allés en Suède construire la cathédrale D'Uppsala. Est évoqué la participation des maçons marchois à l’édification de la digue de Richelieu qui en 1627 assiégeait les huguenots de la Rochelle. En oubliant malheureusement de préciser que ceux-là furent réquisitionner de force.


La Cathédrale D'Uppsala en Suède.


En outre l'article à le bon sens de rappeler qu'un tiers des maçons qui ont participé à l'édification du château de Versailles étaient marchois. Ce n'est là que justice, quand on sait le nombre d'ouvriers qui y laissèrent la vie au cours des trop nombreux accidents et que les manuels scolaires de la république salope préfèrent associer le nom du palais de ce despote à ces quelques architectes courtisans.

Travail de la pierre sur le chantier du château de Versailles.


L'article, court, est assez bien branlé, même si une petite bibliographie n'aurait pas fait de mal.Ce mal est bien pardonné quand le même Kiener affirme "qu'a Paris en 1871, beaucoup de communards étaient creusois." 
Propos qui n'est pas exagéré, quand on consultes les diverses archives où les travaux de la Société des sciences naturelles et archéologiques de la Creuse (www.ssnah23.org);
Sujet que les "Amis de la Commune", trop occupés pour de basses raisons politiques, à faire des insurgés kabyles de 1871 d' authentiques communeux, n'ont JAMAIS oser aborder dans leur bulletin.



mardi 22 mai 2012

AUX MAÇONS DE LA CREUSE MORTS POUR LA COMMUNE.


Article paru dans "IPNS" numéro 36 de septembre 2011, journal d'information et de débat du plateau de Millevaches.


AUX MAÇONS DE LA CREUSE MORTS POUR LA COMMUNE.

- C’est pour les francs-maçons ?
Sempiternel question… épuisante au bout d’un moment, mais inlassablement suivi de la même réponse.
 - Non, c’est pour les maçons de la Creuse.
Voilà comment fût accueilli  « au Mur » en mai 2004, un premier modeste bouquet.
Au Mur…
J’y allais depuis l’âge de 16 ans, pour fredonner Le temps des cerises ; toujours chanté faux et dont le passage « évitez les belles », provoquait les rires gras de quelques gros cégétistes.
Les maçons de la Creuse, pourquoi ?
Parce que LA CREUSE, tiens ! Un père né à Glénic, une mère née a Paris, mais dont la propre mère était d’Ajain. Vacances en Creuse vacances heureuses, c’était encore le meilleur dicton qu’on m’ait déballé à Paris. Pour le reste…
Dire que nos parents venaient de là-bas, qu’on était « d’origine » creusoise, cela faisait souvent glousser. Un ricanement qui déjà, m’esquintait et me blessait. Je n’avais rien à répliquer. Après tout, il n y avait jamais eu grande chose en Creuse. Et dans ma génération née au début des années 1980, les revendications « communautaires » n’étaient pas légion. Pas encore…


Né à Clamart, bébé nageur a Malakoff, puis Marne-la-Vallée à 3 ans. La ville nouvelle, rien d’un ghetto. Mais la banlieue quand même, avec ses photos de classe de la maternelle au lycée, garnie de Sofiane, de Lilia, de Jonathan ; sa clique de Nguyen et ses palanquées de Dominguez. Tous français en fait -moi aussi. Je m’appelle xxxxxx, xxxxxx III comme dit mon grand père.
Puis les années 2000 avec ses « Algérie en force », « Portugal for ever », « mafia cainfri » et consorts. Et moi ? Je suis quoi dans tout ça ? Il y a toujours  les régionalismes, ces folklores de fond de roupettes… Beaucoup de bretons, de corses, de basques ; vous savez les joyeux garçons, les guerriers et les bergères… alors quoi, la race limousine ? C’est de l’barbaque au rayon frais !
Je sui né à Clamart, etc. Mais je n’ai pas « d’origine. » Alors je reprends tout à zéro. Avant que le hasard (l’exode rurale quoi !) ne me fasse naitre en banlieue parisienne, mes aïeux étaient nés  en Creuse. C’est mon 3 /4 de jus, mais pas d’héritage. Mes parents dans la lignée de Mai 68, ne voulaient rien léguer. Et puis ?
Je ne leur en veux pas, les choses étaient ainsi.

Heureusement depuis que je suis marmot, je suis passionné d’Histoire. Alors je gratte, je retrouve les Mémoires de Leonard dans un coin perdu de la petite bibliothèque familiale. Je déniche Histoire des maçons de la Creuse, dans une librairie guéretoise. Je questionne mon paternel. D’un coup, je commence à comprendre pourquoi, les pierres taillées des bâtisses de Paris m’ont toujours fait des œillades. Il y avait ce peu choses que je savais : des ancêtres maçons, depuis des générations et des générations… Antoine Goumy mon arrière-arrière grand père maçon à Paris rue de Flandres, fusilier-mitrailleur tombé sur la Somme. Mon arrière-arrière grand oncle, Jean Alfred Tartary, maçon à Ermont, tué à l’assaut 11 jours avant l’armistice ; comme tant de fils de cette terre blessée.Oui, oui ! « Maudite soit la guerre »… Cette guerre de riche. 
Passons.
Il y a ces choses qu’on sent… Jai une approche visionnaire de l’Histoire. Collégien, j’ai au-dessus de mon lit, une affiche en couleur dû à l’habile coup de crayon de Manara, qui  ne sait pas que dessiner que des paires de fesses. Ce « poster », illustre la défense d’une barricade communarde. Je m’en rappelle, de cette intuition de collégien.


MA VISON à moi : J’en suis ! J’en étais ! Kif-kif… puisque j’en suis persuadé ! Des gens de mon sang en étaient.
Je me regonfle. Un peu facilement certes ; des ses aïeux qui ont bâtis la ville que j’arpente dans tous les sens, cette capitale contre laquelle je me cogne.
Une autre fierté prend le relais.
Celle plus tragique que la Creuse, fut de 1848 à 1871, le 3ème département pour le pourcentage de population poursuivie. « La race la plus sanguinaire et la plus pétroleuse de France », selon l’article on ne peut plus mordant, sinon magnifique d’Alfred Assolant.
Il faut que j’aille plus loin. Et de recherches en recherches, de lectures en lectures, je l’ai ma vieille vision : Des creusois par pleine charrette, pendant la Commune. Pas de chef -tant mieux ! Mais l’ouvrier du bâtiment comme « 30 sous » de base, comme simple soldat de la Sociale. Qu’importe, ils étaient là et m’ont laissé un peu de leur sang, dans mon cœur né pour n’être jamais du coté des oppresseurs mais du coté des oppressés, toujours.
J’épluche « le Maitron » et les archives de paris, les rapports de conseils de guerre plein a craquer de maçons de la creuse. Des aïeux, des cousins ! Parfois attentiste, « touche-la-solde » qui suit les événements et ne s’est engagé que pour assurer sa subsistance. Quelque fois, rallié à la Commune par sympathie ou par mouvement ; parce qu’il s’est senti trahi.
Les creusois à Paris pendant ces 76 jours de 1871 ?
Souvent d’incorrigibles communeux, qui se sont battus les armes a la main jusqu’aux derniers jours, pour l’idéal de la république démocratique et socialeAutant, sinon plus que les grandes figures de la Commune, ils sont les spectres d’un peuple qui a disparu, de ces murs sales de Paris contre lesquelles ont les a collés, pour les abattre comme des chiens enragés. Ils ont eux aussi leur lot d’orbite pendante, de cervelle éclatée, de crevasse béante ouverte sur leurs vareuses de gardes nationaux ou sur leurs blouses. Ils sont à chaque coin de rues. Ils m’avaient touchés, depuis toujours.


Alors ca devient quelque chose que je balance a tout le monde et au final ce n’est plus pour moi, c’est pour EUX. « Pour ne pas répéter une chose ennuyeuse », j’en saoule tous mes amis, toutes mes connaissances ; pas un, pas une n’en réchappe. A chaque coin de rue, je n’ai fais que ca ; répéter cette chose qui ennuyait le parigot.              
Palpant les pierres des deux rives, bon dieu ! C’est du creusois ça !
Et pour le plus ivre, pour le plus sot que moi qui en doutait, un gaviot dans le meilleur des cas, une bouche qui parlait trop, ça saigne ! Petit poing de rat de bibliothèque, pas calleuse pour un sou ; mais descendant de maçon marchois, alors ! Enfant d’émigré… C’est mon lignage, mon blason face à la jeunesse dorée.


LE 248ème bataillon fédéré qui contient le plus grand nombre d'émigrés creusois dans ses rangs.

En ce 140ème anniversaire de la Commune, je veux faire les choses en grands. Un brin retro dans ma dégaine, pas de déguisement ! Je suis comme ça. Un drapeau rouge frangé d’or et ce petit bouquet d’œillets rouge, estampillée de l’inscription que vous devinez.
28 MAI 2011 ? 140 ans après, la montée au Mur…
Toujours laborieuse quand on vient en anonyme, sans écharpe d’élu, sans carte de parti. Mais moi je les veux devant, ces blouses, ces hirondelles blanches qui ont choisi le drapeau rouge, je les veux en première ligne, ces derniers, ces oubliés. Je bataille, je gueule quand on évoque la gerbe pour les 257 luxembourgeois. Je joue des épaules pour être au premier rang suivi de ma petite sœur xxxx, 17 ans, qui tient les fleurs rouges d’outre tombe de quelques milliers de creusois. Je fonce dans le tas, je m’impose ! Enfin, je suis devant.
- Ah il faut s’inscrire ?
- Au nom de quelle organisation ?
- Au nom des maçons de la Creuse morts pour la Commune ! Je suis écumant.
Ma sœur dépose le bouquet, avant tous les partis, avant tous les syndicats. Je salue militairement la plaque, le poing droit serré. Un peu de pose, pas de vanité ; mais un brin de morgue pour ceux qu’on traitait de brutes et qui se sont battus pour la plus noble des causes : la cause du peuple.

Chaque jour en allant travailler, je les vois ceux qui construisent le tramway, débouchonnant un litre sous leur abri quand il neige, creusant sous le cagnard. Ces maçons au bleu de travail, blanchi de poussière de plâtre. Assis à même la chaussée pour bouloter leur kebab pendant qu’autour d’eux brillent l’amour sous les jupes des parisiennes qui passent sans les voir.


La page est tournée. L’Histoire des maçons de la creuse est fini. Mais elle recommence déjà, un peu, avec ceux la. 

Lien du journal IPNS: http://www.journal-ipns.org/

Ceux d'en bas?


Ceux d'en bas? 
Ces Creusois de Paris, les mêmes émigrés qu'on moquaient et qu'on traitaient de brutes ou de sauvage, mais qui ont bâti la capitale du haut de leurs échafaudages .

Ceux d'en bas? 
Ces maçons de la Creuse, citoyens armés pour la défense de leur droit et de leur dignité. Ouvriers du bâtiments de la vieille Marche, toujours citoyens du haut des barricades parisiennes, en luttant pour la justice sociale en 1848 et surtout en 1871.

Ceux d'en bas? 
Sous les plis du drapeau rouge, sur les chantiers ou dans les garnis insalubres, l'ouvrier creusois à Paris au XIXe siècle.

Un Creusois de Paris.